Résultats préliminaires du 12e cycle des indicateurs d'intégrité en Afrique
La publication des résultats préliminaires du 12e cycle de recherche sur les indicateurs d'intégrité en Afrique (AII), un projet de l'Institut africain des politiques de développement (AFIDEP), marque une étape importante puisqu'elle s'appuie sur 11 années de données de gouvernance couvrant les 54 pays africains. Conscients que la nature des données collectées peut susciter des contestations de la part de diverses parties prenantes, notamment les chercheurs, les gouvernements, les OSC et les médias, ces parties prenantes sont invitées, pendant une période de trois mois, à examiner attentivement les données et à faire part de toute preuve ou observation qu'elles pourraient avoir, pouvant infirmer ou confirmer ces conclusions.
Les résultats cumulés du cycle 2 jusqu'aux résultats préliminaires du cycle 12 fournissent une vue d'ensemble des tendances en matière de gouvernance sur une décennie. Les 10 premiers pays sont l'Afrique du Sud, Maurice, la Namibie, les Seychelles, le Cap-Vert, le Ghana, la Tunisie, le Rwanda, le Sénégal et le Kenya. Les 10 derniers sont la Guinée équatoriale, la Somalie, l'Érythrée, le Soudan, le Sud-Soudan, la Libye, l'Angola, l'Égypte, Djibouti et le Congo.
Les données du 12e cycle, couvrant la période de septembre 2022 à septembre 2023, montrent plusieurs et dynamiques critiques à travers le continent africain. Cette période a été marquée par des bouleversements politiques majeurs, notamment le début d'une guerre civile au Soudan en avril 2023 entre les factions rivales du gouvernement militaire : les Forces armées soudanaises dirigées par Abdel Fattah al-Burhan et les Forces paramilitaires de soutien rapide (RSF) dirigées par le chef des Janjawids Mohamed Hamdan « Hemedti » Dagalo. En outre, des coups d'État réussis ont eu lieu au Burkina Faso (septembre 2022), au Niger (juillet 2023) et au Gabon (août 2023). Des tentatives de coup d'État infructueuses ont également eu lieu à Sao Tomé-et-Principe (novembre 2022) et au Soudan (avril 2023).
Les résultats préliminaires du cycle 12 indiquent une performance mitigée pour les différents indicateurs de gouvernance. Du côté positif, les indicateurs relatifs à la représentation des femmes continuent d'exceller. En revanche, les indicateurs relatifs à la divulgation des actifs et au financement politique continuent de sous-performer sur l'ensemble du continent. Cette disparité met en évidence les difficultés persistantes à réaliser des réformes globales en matière de gouvernance.
L'une des tendances les plus inquiétantes observées est le déclin continu de la liberté de la presse et la montée de la censure (y compris le contenu en ligne généré par les citoyens). Au cours de la période considérée, le Burkina Faso a suspendu deux médias étrangers (France 24 et RFI) et un média privé (Oméga). De même, plusieurs journalistes ont été arrêtés en Tunisie et en Éthiopie, et l'Internet a été interrompu en République centrafricaine (RCA), au Sénégal et au Gabon, les autorités cherchant à contrôler le flux d'informations lors d'événements critiques tels que des référendums et des élections en RCA et au Gabon respectivement, et des troubles civils au Sénégal.
Les blogueurs et les utilisateurs de réseaux sociaux en RCA, en République démocratique du Congo (RDC), en Tanzanie et au Kenya ont également fait l'objet d'une surveillance et d'une répression accrues. Les Seychelles, malgré leur bon classement (4e) dans les scores cumulés, ont connu une ingérence notable du gouvernement dans les activités des médias, ce qui souligne la complexité du maintien de la liberté de la presse, même dans les pays relativement bien classés.
Par rapport au 11e cycle, la note cumulée du Soudan a chuté de manière significative lors du 12e cycle en raison du conflit en cours, qui a gravement affecté le fonctionnement de ses institutions. La guerre civile a perturbé la gouvernance et sapé les efforts déployés précédemment pour promouvoir la stabilité et les réformes. Le Botswana a également connu une baisse significative de sa note cumulée, attribuée à plusieurs facteurs. Il s'agit notamment de l'ingérence du gouvernement dans l'indépendance du pouvoir judiciaire, des efforts visant à saper la syndicalisation des travailleurs par l'intermédiaire du Conseil de négociation de la coordination de la fonction publique (PSCBC) et des restrictions imposées à la capacité des citoyens à se réunir librement. L'ensemble de ces actions a contribué à une régression des performances du Botswana en matière de gouvernance. En Guinée-Bissau, l'incapacité de l'institution d'audit suprême (Tribunal De Contas) à publier les rapports d'audit à temps et la diminution du nombre de femmes représentées à l'Assemblée nationale ont largement contribué à la baisse du score cumulé du cycle 12 par rapport au cycle 11. Ces problèmes reflètent les défis persistants en matière de transparence et de représentation des femmes en Guinée-Bissau.
Les Comores, en revanche, ont connu une amélioration significative, avec une hausse de 250 points de leur score cumulé. Cette amélioration est due à un meilleur environnement de travail pour les ONG, à un contrôle policier plus strict et à la publication de données sur l'emploi et la pauvreté. Contrairement au 11e tour, où l'ONG Mebadja avait été interdite pour avoir organisé des manifestations, aucune ONG n'a été harcelée ou fermée lors du 12e tour. En outre, un policier accusé d'avoir violé une femme malgache en garde à vue a été arrêté, ce qui indique des progrès en matière de responsabilisation de la police.
La période de retour d'information est essentielle pour valider ces résultats et s'assurer que les données reflètent fidèlement les réalités du terrain. Nous encourageons toutes les parties prenantes à interagir avec les données et à partager leurs idées, afin de contribuer à une compréhension plus solide et plus complète de la gouvernance en Afrique.
Accédez aux données ici et envoyez vos commentaires par e-mail à aii@afidep.org ou via le formulaire ici.